Colonne avec table des matières

         Solitudes

Solitude

 

Le château de Mal-Dormir

 

Sables mouvants

 

Désir de silence

 

Rêve

 

Vague

 

Nuit sans lune 

  

Souvenir perdu 

 

Orage 

 

Post scriptum 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Solitude

 

Lève la tête, ô Solitude,

Amie que Dieu me donne

                      en cette nuit.

 

Vois sur toi se pencher

                 les myriades d'étoiles,

          mille regards brillants

          qui t'observent.

          mille points de supension

                                à la fin d'un jour morne,

          mille et mille âmes, enfin,

                           perdues dans les ténèbres

 

et parfois

         solitaire

                    une comète

                              silencieusement

glisse entre ces mondes de ténèbres.

 

 

C'est le voile flottant dans l'espace infini

d'une étoile flottante entre deux points d'appui,

 

c'est la voile dorée d'un navire inconnu

 

c'est une aube lointaine et à peine ébauchée

                    qui fuit

                             là-bas...

 

Le ciel tourne.

La nuit pâlit.

Un reflet violacé teinte l'univers endormi

 

et les mondes scintillent à l'orée de la nuit

                    qui fuit

                              là-bas...

 

Le vent soufle.

Les nuages s'envolent

            tout gris dans le ciel noir,

            si gris...

Et eux aussi s'en vont

vers ces mondes brillants

vers ces mille regards

ces points de suspension

             qui fuient...

 

Devant tant de splendeur

en la nuit de novembre où les feux semblent fuir,

j'ai déchiré la feuille où s'étalaient des mots,

où de vagues sourires prétendaient imiter

                  les fières étoiles,

 

         J'ai déchiré le silence.

 

Tous les mots désormais inutiles

            ont fui.

Ils ont rejoint les étoiles,

les myriades bleutées,

aux reflets violacés

Et jusqu'au silence ils ont fui

dans l'espace infini

 

                jusqu'au Silence

 ô Solitude !

 

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Le Château de Mal-Dormir

 

Nuit bleue, veinée de lourd silence,

Nuit bleue remplie de rêve...

 

Dans le château de Mal-Dormir,

La Belle est une Absence

Aux longs cheveux dénoués

Sur son lit de Chimère ;

En la forêt de Solitude

Un prince viendra-t-il ?

S'en viendra lui porter

Le sommeil aux yeux clos

Tout maculé d'étoiles.

 

( Rires des baldaquins brodés de sentinelles...)

 

Pourquoi le Chevalier des Songes

Viendrait-il m'emporter ?

Je ne suis pas la Belle

Au château des Toujours ,

Pas même la princesse

Evadée de la tour !...

 

Mais ma nuit n'est pas moins

Peuplée de souvenirs,

D'étranges mélopées,

Obscures sentinelles

Aux portes de ma vie,

Immenses forteresses

Elevées sur mon coeur,

A l'entour de mes mots,

Au bord de mon poème.

 

J'écris sans savoir quoi

Et mon rêve est intact,

Terre vierge et sauvage

A l'abri de mes sens

Et de vos déraisons.

Ma musique intérieure

Me dicte ces paroles

Et ce sont mes navires

Qui les portent, à tous vents.

 

Mais le grillon chanteur

Et le souffle des brises

Pleurent bien mieux que moi

La magie d'une rime !

O Nuit, Nuit solitaire,

Reine des Solitudes...

 

Une informe souffrance

Vient déchirer la lune,

Cette lune blafarde

Au-dessus des forêts

Qui renferment ce soir

Le noir château du Mal-Dormir...

 

Faudra-t-il pour cela

Quitter ces paysages ?

Tuer le Prince errant

Dans ces faux marécages ?

 

Ou rechercher la biche

Aux longs yeux suppliants,

Asservir l'aigle-roi

Dont le vol est un hymne

A la pure liberté ?

Dans ces Hauts Paysages

Il flotte un parfum suave

De terre mouillée et sure,

De bête traquée, aux abois,

De sauvage liberté perdue ;

La forêt ruisselle de lumière,

De pluie, de feu, de peur,

Et peut-être d'amour...

 

Mais peu importe !

L'essentiel est tari.

La fontaine s'est tue,

Et l'eau vive est stagnante.

 

Une aile sombre est passée là,

Une ombre couvrante, froide,

Oh, froide, comme une tombe !

Glacée.Immobile.

Morte – Comment savoir ?

 

Une porte restée ouverte

Et la douceur enfuie.

A jamais, si ce mot existe.

 

Mais le Néant n'est rien,

Et toute absence prend fin

A la source de l'Amour

Où l'Ame se vivifie

Et prend sa renaissance...

Alors tout recommence !

Morte ? C'est un faux adieu,

Une fausse note dans le chant,

Ou peut-être une clef glissée dans la serrure...

 

La biche aux yeux pleureurs

A retrouvé son faon

Et l'aigle majestueux

Contemple son royaume.

Il y a toujours un autre faon,

Une autre biche, un autre roi

Des hautes altitudes,

Et après l'Absence,

Il y a toujours une autre Absence,

Mais c'est la même Solitude.

 

Dans la forêt trompeuse

Les herbes chantent.

 

Et l'odeur de la nuit

Se répand de toute part.

Mais le Prince est parti.

La Belle a renoué

Sa longue chevelure

Et les rayons dorés de la lune

Ferment les portes bleues

Du vieux château de Mal-Dormir...

 

 

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Sables mouvants

 

Ce soir la lune est morte.

Les sables sont mouvants.

 

Indicible absolu

Des terreurs cachées.

Silence opaque

Où rien ne transparaît.

On m'a volé mon réconfort.

 

Les oiseaux de haut-vol

Ont pu crier leur haine,

Leur désir, leur amour,

Leur indicible, au-dessus des vagues.

Mais moi je n'ai pas pu.

C'est trop secret en moi,

Enfoui depuis trop longtemps.

 

Sous la mer, les fonds.

Les algues, et puis la fange.

Les abysses de boue

Couronnés d'épaves.

Et le silence opaque

Jonché de lettres mortes.

 

Je voudrais ressentir

Quelque douleur du corps,

Avoir mal autre part,

Avoir un autre étau

Que celui de mon âme.

 

Et que mon hurlement

Soit compris pour cela :

Pour un mal avouable,

Simple,classable, raisonnable.

 

Mais qui comprendra

Une souffrance bâtie

Au long de vingt années,

Dérivant au fil des ans

Comme une épave au fil de l'onde ?

Qui défera pierre par pierre,

Rocher par rocher,

Cri par cri,

Coup par coup,

Sanglots par sanglots,

Silence par silence

Le gigantesque et monstrueux

Edifice de ma souffrance ?

 

Hurler ! Hurler ! Seule survie possible !

Je n'en ai même plus la force...

 

Le mur est devant moi

Immense, lisse, gluant,

Inattaquable.

Inaltérable.

Imperméable.

 

Et vous...

Partez.

 

Vous ne comprenez pas

Les plages arides de mon île.

Vous ne comprendrez rien

Aux goëmons desséchés,

Aux flaques misérables.

 

Mais partez donc, partez !

 

Vous restez là sans nom,

Sans voix, sans amour,

Les yeux fixes et sans fond.

Et vous m'avez volé

Jusqu'au droit d'expliquer...

 

Et quoi ? Quoi de plus ?

Ah, ce cri de bête traquée

Que je sens monter là

Au creux de mon silence...

Hurlement fou,blessé.

Mais à quoi bon...

 

Ah, si j'étais une bête

Au profond des forêts,

On aurait compris

Mon hurlement de fauve.

Toutes les bêtes crient devant la mort !

 

Mais ces mots bousculés

S'engluent dans les mouvants.

Un, deux, trois,

Nous irons au bois.

La ronde est formée

Sans moi, merci.

Je vous en prie
Vous ne savez pas écouter le silence.

Mais pourquoi ne puis-je crier

Qu'en silence ?

 

Et toi, tu n'as rien compris,

Comme les autres.

Tant mieux.

Laisse moi m'en aller,

Mais seule.

Pas comme ça.

Pas comme les autres.

Encore plus seule.

 

Au moins dans la solitude

Retrouverai-je

Le réconfort d'une chose connue.

 

Et encore...

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Désir de silence

 

Et voici qu'il me vient

Un désir de silence...

 

Il est tard.

Nulle flamme

Non, nul souffle

N'attise mon foyer.

Mais la Solitude.

 

Je ne sais quoi remue

En moi des souvenirs,

D'étranges souvenirs imprégnés de soleil.

Et des rêves aussi...

 

Robes à crinolines,

Visages masqués de carnaval,

Et les canaux sans fin d'une Venise ancienne.

Un oiseau crie dans le silence.

La perche bat l'eau verte.

Les reflets se confondent :

Où est le ciel, où sont les eaux ?

Les eaux ont absorbé le ciel

Et le ciel plonge au sein des eaux.

 

Tout glisse. Il fait si chaud.

Il y a deux soleils,

Peut-être sept, ou mille...

Comment savoir ?

 

Et le bruit des chevaux

Sur le ponton de bois,

Etrange tambourin...

Entends-tu ces grelots ?

 

Les grelots se sont tus.

Immobile silence

Où, neigeuse, vient éclore

Une douce asphodèle.

Et l'asphodèle se fane

Car tel est son destin.

 

Robes à crinolines

Et lointains sons de fête.

Un piano joue sur l'eau,

Quelque part, et le rêve

Semble plus vrai soudain...

 

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Rêve  

Rêve de poésie,

Furtif épanouissement

de mes pensées secrètes.

Rêve d'étrangeté,

d'insondables silences

et d'impossibles songes.

Rêve de volupté

de désir en errance

et d'errance en mensonge...

Rêve d'un temps lointain

où les fleurs du chemin

jonchent un sol aride,

Rêve d'un jour nouveau

ruisselant de lumière

avec des chants d'oiseaux,

des rires sans frontières,

des chuchotis de jonc,

froissements de roseaux,

de l'eau dans les ornières

où dort un reflet bleu

de ciel et d'océan,

de vent et de soleil,

de libres envolées

vers l'au-delà du rêve...

Oh, mes libres oiseaux,

mes princes de la mer !

Images enivrantes

de vos souples envols,

frôlant l'onde parfaite

et jaillissant soudain,

hôtes des roches dures,

hôtes des clairs matins

et des soirées profondes...

Vous évoquez le rêve

et planez dans l'azur,

pleins de sérénité,

d'espace et de silence...

 

Rêve de longs sommeil

où l'heure s'engourdit.

Rêve d'horizons blancs,

de sables blonds et fins,

de vagues vagabondes,

de voyages sans fin...

Rêve d'infini bleu,

et d'étranges pays

où règne le silence.

 

Rêve de pluie glacée,

tambour de guerre lassée,

musique révolue

de temps immémoriaux.

Rêves de froids cortèges

au cœur d'un noir hiver,

d'absence inexpliquée,

d'éternité sans joie,

sans toi, sans espérance...

Rêve de corbeaux morts

jonchant le sol aride

où mes larmes se fondent,

où fanent les herbes folles.

Rêve de pluie, de froid,

d'espace et de silence.

 

Tous ces rêves partis

en pure évanescence

et qui formaient pourtant

chacun, en leur essence,

un fragment de ma vie,

tous ces rêves ont fui

me laissant chaque nuit

tenter ma renaissance.

 

   Retour

Vague

 

Il fait noir dans mon cœur.

Les vagues bleues

recouvrent tendrement

le sable blanc.

Et l’encre bleue

comme une vague

lentement

recouvre le papier blanc

de rêves inachevés

de pensées ébauchées

de semblants de silence.

 

Quel vent du large

pousse sa mine ?

Quels mots troublants peut-il écrire

sur ce sable trop blanc

où le silence

semble sourire ?

 

     Retour

 

Nuit sans lune

 

Je veux fermer les yeux

pour sonder mes pensées :

alors l'obscurité

m'empêche de les voir.

 

Etre seul c'est garder

               farouchement

l'illusion qu'on ne l'est pas.

 

Et qu'est-ce que le désespoir,

si ce n'est une nuit sans lune ?

 

Le vent emporte mon espoir, mon rêve,

                          mon poème

et jusqu'à mon silence,

Et jusqu'à son image.

Mais quand il n'est pas là

j'ai tant de chose à lui dire

que son message,

quand il est là

et me regarde

 

           se noie dans son sourire.

 

Retour

Souvenir perdu

La pluie, et puis le vent.

Une lettre attendue,

L’absence, un long moment

De rêve et de silence,

Un souvenir perdu.

 

Je songe à tes yeux doux,

A tes gestes si tendres,

Comme un souffle sur l’onde,

Un printemps revenu,

Une fleur épanouie.

 

Je songe à ta douceur

Comme une pêche blonde,

Et pleine, et satinée,

Un vrai fruit de l’été !

Quand le soir agonise…

 

Mais le regard ému

Détourne sa caresse :

       Ai-je trop demandé

Ou n’ai-je pas su voir ?

Ou pas su te rejoindre.

 

L’espoir était trop pur,

Et le geste trop tendre–

Mais l’amour aurait su

Combler nos solitudes

Et joindre nos destins.

 

La pluie, et puis le vent,

Compagnons incertains

Mais fidèles, toujours –

Et prêts à revenir

Pleurer mon rêve ancien.

 

Reviendras-tu bercer mes songes éplorés

Oh, toi qui n’étais rien

Qu’à peine une ombre grise

Au détour du chemin ?

Toi dont j’étais éprise…

 

Reviendras-tu chercher

La perle imaginaire,

Le trésor englouti,

Le mystérieux sourire

Où frémissent mes larmes ?

Retour

Orage

Ce soir la lune est morte,

Les sables sont mouvants.

L’orage au loin gronde et s’éloigne

mais mon cœur est si lourd,

si fatigué d’attendre.

 

J’ai cru pourtant un jour saisir l’oiseau volage,

Cet amour qui chantait

Au creux de mes désirs.

Mais le bonheur déjà,

le bonheur si ténu,

le bonheur d’être aimée ne m’a pas retenue.

 

Les sables sont mouvants,

les sables qui m’étouffent.

Les sables sont si fins qui font au sablier

s’écouler les minutes et les joies de naguère.

Si je m’étais trompée… !

 

Et je redis les mots que je disais, avant.

        avant les coups du sort,

        avant les coups de mer,

        avant les jours mauvais :

 

« Ce soir la lune est morte,

 Les sables sont mouvants… »

 

Ce soir le doute emporte

et ronge l’avenir.

Ce soir je ne sais plus

les mots de ma prière.

Ce soir le lourd silence

a dépecé mon âme.

Si je m’étais trompée… !

 

Mes anges de douceur,

mes enfants, de mon sein

surgis nus et fragiles

et réchauffés d’amour,

retiennent mes espoirs

et me font croire encore…

 

Mais mon amour à moi,

l’amour qui me guidait

sur mes routes sans lune,

sur mes landes arides

et mes rivages durs,

mon amour amoureux,

qu’est-il donc devenu ?

Si je m’étais trompée… !

Retour

 

Post scriptum :

J’ai beaucoup écrit

J’ai beaucoup parlé.

 

               Et maintenant,

 

                       Solitude,

 

Tu restes ma seule compagne,

Tu restes seule à partager

 

L’inexprimable silence

De mon âme.

 

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